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Avec Paperboy, Lee Daniels vient de frapper un grand coup. Scandale ? Provocation ? Le festival qui s’endormait vient en tout cas de se prendre une bonne claque dans la gueule. Et ne parle plus que de ce thriller sudiste qui montre la masturbation de Nicole Kidman, de la sodomie suivi d'une scène de torture sur la personne de Matthew McConaughey, ou du final hardcore de ce film dérangeant. Qu’on déteste ou qu’on aime, on est obligé de reconnaître à Lee Daniels a le don de frapper les esprits. Confirmation lors d’une rencontre de son équipe (Lee Daniels était entouré de Zac Efron, Matthew McConaughey et John Cusack) avec quelques journalistes…Lee, parlons du peegate.Lee Daniels : Du peegate ?Oui, le "scandale de la pisse" sur Twitter. On ne parle que de la scène où Nicole fait pipi sur Zac Efron.John Cusack : le scandale ? Le vrai scandale c’est que vous soyez obsédés par ça. Si vous en parlez comme ça, c’est que c’est vous qui avez un problème. C’est du fétichisme, non ? Par rapport à tout ce qu’il y a de choquant, d’audacieux et de provocant dans le film, cette scène là, je la trouve un peu légère…C’est pas un peu facile ? Matthew McConaughey : Avant que tu ne répondes, Lee, je voudrais juste préciser que c’est une réalité. Si vous êtes piqué par une méduse, l’urine est le meilleur désinfectant.LD : le personnage est frustré parce qu’il ne peut pas baiser sa copine. Il part donc nager parce qu’il est furieux et il tente de noyer sa rage, sa frustration et son érection en s’épuisant à la nage. Arrivé à la moitié, il se fait piquer par une méduse. Comment soigne-t-on une piqure de méduse ? En urinant dessus. C’est comme ça que Pete Dexter l’a écrit dans le roman et c’est comme ça que j’ai voulu filmer cette scène. Je vais maintenant vous poser une question : combien de journalistes ont aimé le film ? (les 9/10 des journalistes lèvent la main). Qui ne l’a pas aimé ? (2 journalistes lèvent la main). Parfait. Je ne suis pas ici pour vous faire plaisir. Je suis là pour dire la vérité. Chaque personnage de ce film sont des gens que je connais vraiment ! Que je comprends intimement ! Si vous ne les comprenez pas, pas de problème : bienvenue dans mon univers.Tous les films américains de la sélection peuvent être vus comme des commentaires de la société US contemporaine. C’est le cas de Paperboy ? LD : Un commentaire ? Mon seul commentaire, c’est : « fais attention à ce que tu espères ». J’ai fait ce film parce que je suis un réalisateur black et gay. Dans les années 80, j’ai eu des relations sexuelles avec beaucoup de blancs qui refusaient de me voir en public. Parce que j’étais noir. Ça les gênait et ça les gênait encore plus de penser ça. Ils se détestaient. J’ai fait ce film parce que mes sœurs étaient en prison et qu’elles écrivaient à des hommes en prison. J’ai fait ce film parce que mon frère a été en prison, pour une très longue peine. J’ai pris soin de ses enfants et il a rencontré des femmes qui lui écrivaient pendant sa détention. Je comprends ces gens. Bienvenue à ceux qui ne les connaissent pas !Sur le peegate, vous dites que vous vous contentez d’adapter Pete Dexter. Mais vous changez par ailleurs beaucoup de choses du roman… Parce que  le film doit fonctionner pour moi. Yardley est représentatif de n’importe quel black que je connais. Obama n’est pas arrivé là où il est par hasard. On a tous deux visages. Celui que j’ai là, en face de vous : « hey, bonjour, comment allez vous, white people ? ». Et celui que j’ai avec mes amis, ma famille. Vous pensez que Yardley est arrivé là où il est, comme ça ? Non, il a dû faire des sacrifices… surtout dans les 60’s. Anita est plus développée que dans le roman, parce qu’Anita représente ma mère ; elle représente ma tante ; elle représente beaucoup de femmes noires qui étaient sous-représentées à l’époque.Comment vous gérez les premières critiques du film ? Vous pensez auxquelles ? Je n’ai pas été critiqué pour l’instant. Je vous le dirai quand ce sera le cas. I’m ready.OK, si on vous dit que le film est manipulateur et outrancier ? Manipulateur ? Pas plus que l’histoire d’une gamine black de 250 kilos atteinte du SIDA. On a dit que j’avais manipulé les gens avec l’histoire de Precious. Ce n’était pas de la manipulation, c’était la vérité. La VERITE. Parfois, ça ressemble à de la manipulation. C’est inconfortable, ce n’est pas beau à voir. Mais c’est comme ça, désolé. Propos recueillis par Gaël GolhenEn images : les choix les plus risqués de Nicole KidmanThe Paperboy hué à Cannes : le festival tient enfin son scandaleSuivez toute l'actu cannoise sur notre dossier spécial avec Orange Cinéday