Mulholland Drive (2001)
Bac Films

Le grand classique de David Lynch avec Naomi Watts et Laura Harring est rediffusé ce soir sur Arte.

A l’occasion de la rediffusion de Mulholland Drive, le classique de David Lynch sur Arte, nous nous sommes plongés dans les archives de Première pour revenir sur le mystère Mulholland Drive.

A sa présentation en mai 2001 au Festival de Cannes, le film de David Lynch remporte le prix de la Mise en scène tout en plongeant ses spectateurs entre adoration et perplexité face à un schéma narratif décousu. D’ailleurs, même vingt ans plus tard, il suffit de taper "Mulholland Drive" dans notre barre de recherche pour retrouver dans les premières suggestions les mots "analyse" ou "explication". Et pour cause, Naomi Watts et Laura Elena Harring arpentent, désorientées, déchues, les rues sinueuses d’un Hollywood légendaire, le long d’une route sinueuse et sombre dans les hauteurs de Los Angeles, et puis un accident... Notre esprit se borne, trop rationnel à trouver un sens aux évènements, aux visions mystérieuses et hallucinantes. Les questions tourmentent les spectateurs : qui est qui ? où est le réel ? Les premières minutes du film sont-elles les dernières ? Dans le numéro du mois de juin 2001, Gérard Delorme écrivait pour Première un article annonçant Mulholland Drive comme un film qui semblait être "un mélange d’amnésie et de confusion d’identité [qui] rappelle furieusement Twin Peaks et Lost Highway." On ne peut s’empêcher de comparer aux autres œuvres de Lynch ce qu’on pense être des indices, se raccordant à Blue Velvet, à Lost Highway (d'après nous film ultime des années 90) et à Twin Peaks... Il est trop tentant d’interpréter l’image du clochard couvert de suie que voit un jeune schizophrène comme une référence à Bob, la figure désincarnée du mal par excellence de Twin Peaks. Et ce rideau rouge, on l’a aussi vu dans Lost Highway, pas vrai ? La scène de danse qui ouvre le film est-elle, oui ou non, inspirée du Magicien d'Oz ? Les analyses se multiplient, se répondent et se démentent, si bien que nous ne savons plus réellement ce qui est vrai ou non. Et n’est-ce pas l’objet même du film ?

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Novembre 2001 : Mulholland Drive sort en salles françaises, et Gérard Delorme interroge justement Lynch sur le sens de son film dans les pages de Première. Mulholland Drive, qui devait être à l’origine une série pour la télévision dérivée de Twin Peaks, est devenu par la force des choses un long métrage. Le réalisateur confiait même qu’il pensait "que cette histoire a toujours aspiré à devenir un film". Mais face aux questions trop inquisitrices quant au sens de Mulholland Drive, il est tout à fait clair : "Je n’aime pas trop m’étendre sur la signification des choses." Un choix d’ailleurs soutenu et confirmé par l’actrice principale, Naomi Watts. Quand le journaliste Christophe Carrière la questionne au sujet de ce qu’elle en a compris, elle répond du tac au tac : "Pourquoi vouloir tout savoir lorsqu’on regarde un film ? Dans la vie, il y a un paquet de choses auxquelles on est incapable de répondre chaque jour." Il nous semble alors que David Lynch ne nous a pas enfermé dans notre incompréhension mais nous a plutôt délivré du sens. L’actrice définit d’ailleurs très bien ce sentiment : "C’est toute la magie de son travail : le public est enfin libre de penser par lui-même."

Mulholland Drive reste alors cette route sublime, hallucinante et énigmatique, qui aura le sens que vous voulez bien lui donner, à arpenter sur Arte à 21h.


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