De bas étage de Yassine Qnia
Shana Besson/ Le Pacte

Rencontre avec l’héroïne de De bas étage qui, depuis 3 ans et sa révélation dans Climax de Gaspar Noé, enchaîne avec bonheur sur grand et petit écran

Comment vous retrouvez- vous à l’affiche de De bas étage, dans le rôle de l’ex- compagne du petit voyou trentenaire dont le monde s’effondre – (campé par Soufiane Guerrab) mais qui va tenter de la reconquérir ?

Souheila Yacoub : Yassine m’a contactée par mon agent qui m’a incitée à le rencontrer. Et dès le premier coup de téléphone, il s’est passé quelque chose. Sa douceur vous marque immédiatement. On s’est retrouvés autour d’un café. Il a commencé à me raconter son parcours. Très humblement. Puis il m’a parlé de De bas étage. Il m’explique qu’il n’a jamais tourné avec des comédiens professionnels et que ça lui fait peur. J’ai trouvé ça hyper honnête et touchant.

Et il vous dit quoi de son scénario ?

Absolument rien ! Il me le tend, je commence à le feuilleter mais il m’arrête et me dit de le faire tranquillement chez moi. Sauf qu’avant même de le lire, j’avais envie de travailler avec lui. Son humilité, le fait qu’on sente immédiatement qu’il a énormément de choses à dire… J’avais une entière confiance en lui. Et le scénario n’a fait que confirmer cette première impression


Qu’est-ce qui vous a séduit précisément ?

A quel point tout y sonnait vrai et que la lente chute du personnage que joue Sofiane était crédible. La qualité des dialogues aussi. Notamment dans les échanges entre nos deux personnages qui se disent parfois violemment leurs quatre vérités en face mais avec un incroyable naturel. On croit à tout. Il y a presque un côté documentaire dans cette fiction. Aucun effet, pas même de musique

Comment avez- vous créé votre rôle ?

Yassine a commencé par m’expliquer qui était cette jeune mère de famille. Car il la connaît bien : elle lui a été inspirée par la compagne d’un de ses amis. Il me l’a décrite comme une jeune femme qui essaie juste de se sortir de la galère mais très fatiguée. Or, je tournais No man’s land quand le tournage de De bas étage a débuté. Donc je suis arrivée claquée, lessivée. Bref, dans l’état idéal ! (rires) Mais j’avoue que j’étais un peu stressée. Car certes l’histoire que raconte De bas étage est universelle et elle me parle totalement même si je viens d’un autre type de banlieue, la banlieue suisse. Mais mes partenaires se connaissaient tous car viennent tous d’Aubervilliers. J’étais un peu la pièce rapportée (rires). Mon but était de paraître immédiatement crédible au milieu d’eux et que mon personnage puisse être une porte d’entrée au récit. Et forcément ça m’a mis un peu de pression.

DE BAS ETAGE : LA REVELATION D'UN CINEASTE [CRITIQUE]

Qu’est ce qui avait donné à la gymnaste de l’équipe nationale suisse que vous étiez l’envie de devenir comédienne ?

Depuis toute petite, je savais que je voulais travailler dans un milieu artistique. Mais quand j’ai arrêté la gym en 2012, tout était un peu flou pour moi. Je savais que j’avais besoin de partir de la Suisse et d’extérioriser quelque chose. Mais je ne savais pas si ça devait passer par la danse, par le corps ou par la parole, alors que j’étais alors extrêmement timide. Et puis un jour, j’ai lu des alexandrins. Je n’y comprenais absolument rien mais leur musicalité et leur souffle m’ont donné des frissons et des émotions incroyables. Ce fut le déclic pour tenter de partir à Paris. J’ai tapé sur Google « cours de théâtre » et je me suis retrouvé au Cours Florent puis à passer le concours du Conservatoire que j’ai pu décrocher. Se retrouver sur scène fut une révélation. Défendre des textes. Être élevée par des textes. Transmettre des émotions aux gens. Puis avoir la chance de travailler avec Wajdi Mouawad pour Tous des oiseaux au Théâtre de la Colline… Tout s’est incroyablement enchaîné pour moi. Même si tout n’est pas toujours rose ou facile dans ce métier

Pourtant, depuis vos débuts au cinéma en 2018 avec Climax de Gaspar Noé, on a l’impression que vous n’avez pas arrêté…

C’est vrai. J’ai beaucoup travaillé. C’est la première fois depuis trois ans que je me retrouve là avec deux mois de pause. Et tout de suite, le doute vient. C’est fou ! Mais j’ai eu la chance de travailler avec de grands cinéastes, dans des projets très variés, des univers aux antipodes les uns des autres, au cinéma ou dans des séries : Gaspar Noé, Philippe Garrel, Rebecca Zlotowski… Pour l’instant, mon chemin me comble au- delà de mes espérances. Entre un Gaspar Noé où il n’y avait pas de scénario et le travail avec un Philippe Garrel qui est le roi de la première prise, le voyage est dingue. C’est un Graal en début de carrière ! Mais ce dont je rêve maintenant, c’est de réussir à faire rire. Je suis une grande admiratrice de Cameron Diaz. Ceux qui savent faire rire m’impressionnent tellement : l’humour est la chose la moins partagée au monde !