Fluctuat
Jean Becker aime la campagne et y revient encore une fois. D'abord imparfait, trop écrit, trop joué, son nouveau bébé champêtre manque son démarrage mais finit en beauté. Exception qui fait mentir la règle : on ne récolte pas toujours ce que l'on sème !
- Exprimez-vous sur le forum Dialogue avec mon jardinierLe pitch tient en quelques lignes. Un peintre parisien revient dans sa cambrousse et, cherchant un jardinier, retrouve un copain d'enfance. Le premier est en train de se faire quitter par sa femme, le second se fait rattraper par la fatigue d'une existence éprouvante. Daniel Auteuil en artiste, Jean-Pierre Darroussin la bêche en main. Dupinceau et Dujardin sont dans une barquette... Qui est-ce qui pêche ?Un début bavardPlus dialogué tu meures. Les trente premières minutes du bien nommé Dialogue avec mon jardinier sont si intenses en répliques qu'elles feraient presque peur. Très écrit (et pour cause : Jean Becker adapte le roman de Henri Cueco), le film commence comme une longue discussion en mal de respirations. Le ping-pong oratoire s'accélère sans laisser place au moindre silence. Conséquence directe : les comédiens, dont personne ne viendrait nier qu'ils sont pourtant parmi les meilleurs de leur génération, rament pour atteindre le naturel. Ils ont appris leur texte, connaissent par coeur celui de l'autre, se renvoient les mots à toute vitesse. Pied au plancher, aucun n'a le temps de feindre correctement la surprise, la compassion, l'intérêt ou l'attente.Et puis, soudain, les personnages s'épaississent. L'atmosphère se nourrit des alentours verdoyants, des souvenirs évoqués... Toujours ultra dialogué, le scénario s'aère cependant, l'humour joue des coudes pour émerger et les rires se mettent à sonner juste. Au coeur d'une mise en scène discrète, somme toute assez académique, le duo Auteuil-Darroussin trouve alors le ton. Bientôt, le film se mettant en place, la page du bouquin adapté disparaît derrière l'écran. Cette fois c'est du cinéma et on se laisse embarquer. Fini la littérature filmée : l'émotion, enfin, passe.Le juste miroir de l'autreLe parisien et le paysan, l'artiste et le bouseux, la ville et le terroir. Cliché ? Evidemment. Mais, finaud, Becker joue la rencontre plutôt que la confrontation. Expose, dessine, nuance et ne juge jamais. Deux êtres aux vies opposées se rejoignent, s'amusent l'un de l'autre, s'adaptent et s'influencent sans rien annuler. Chacun jette un oeil bienveillant de l'autre côté du miroir. Au programme : richesse des différences, découverte d'une sagesse aussi valable qu'étrangère, et à chaque instant un respect sincère. Bonus : comme il sait si bien faire, Becker insuffle à tout ça une généreuse tendresse, dont la poigne de velours finit par prendre aux tripes. Tout bancal qu'il avait commencé, son Dialogue avec mon jardinier s'achève dans la justesse la plus touchante. Fleuri comme on aurait pas osé imaginer. Dialogue avec mon jardinier
De Jean Becker
Avec Daniel Auteuil, Jean-Pierre Darroussin
Sortie en salles le 6 juin 2007
Illus. © Studio Canal
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Le JDD
par Jean-Pierre Lacomme
Chaleur, générosité, gentillesse sont les maîtres mots du cinéma de Jean Becker depuis Les enfants du marais. Mêmes causes, mêmes effets, on retrouve dan le film cette empathie bienveillante pour les gens modestes de la campagne. La thèse serait recevable si le cinéaste ne confondait pas simplicité avec simplisme.
Télérama
par Pierre Murat
Jean Becker est un grand pro, dont on a aimé, jadis, les premiers films, inaboutis et ambitieux (Un nommé La Rocca, Echappement libre). Il signe désormais des triomphes pépères, vaguement neuneus, mais pas désagréables, où il fait rire et pleurer un public tout acquis. C’est dire qu’il a, à sa façon, du talent.
Le Monde
par Jean-Luc Douin
Sympathique, le projet pâtit d'une mise en scène paresseuse, d'un humour réchauffé et d'une enfilade de lieux communs : on y est invité à prendre "un p'tit café", on dit à propos des souvenirs d'enfance que "c'est loin, tout ça !" et la mort est tapie comme une carpe "qui aura le dernier mot".