Toutes les critiques de Infernal Affairs

Les critiques de la Presse

  1. Fluctuat

    Il faudrait être blasé ou d'une mauvaise foi à toute épreuve pour dire du mal d'Infernal Affairs, le nouveau (et pourtant ancien, le film a déjà deux suites) polar d'Andrew Lau et Alan Mak. D'abord parce que des films de cette envergure sont plutôt rares, ensuite justement parce qu'ils le sont, ils nous sauvent du naufrage hebdomadaire des sorties de l'année 2004.
    Andrew Lau est l'homme de Stormriders, A Man Called Hero, Young and Dangerous. 1, 2, 3… trop long à compter. Un cinéaste dont l'ambition non dissimulée est celle du ticket d'entrée. Le genre qui respecte son spectateur et qui n'a qu'une idée en tête : plaire et satisfaire même si l'on doit passer par quelque pacte un brin mercantile. Une histoire d'argent ? Du cinéma corrompu par le mirage du box office ? Seuls quelques cinéphiles new-age et critiques à leurs heures peuvent tenter de faire croire à une idée pareille. Infernal Affairs c'est la survie du cinéma hong-kongais et moins sa nostalgie. Une histoire de flic, de truand, de taupe, où il faut survivre en flic infiltré dans la mafia et survivre en mafieux infiltré chez les flics. Equation simple et compliquée, intrigue à tiroirs et tensions, face à face et surtout défilé de stars.Rien que pour elles, les stars, il faut acheter son ticket pour Infernal Affairs. Parce que Tony Leung - le plus bel acteur du monde - ce sera toujours mieux qu'un acteur de François Ozon. Maigre argument ? Le meilleur, le cinéma français ne sait tellement plus bander qu'il tente de rendre stérile ceux qui viennent le regarder. Aucun rapport ? Le cinéma, c'est quoi ? Du désir, rien que du désir contre quelques pièces ou un ticket de carte bleue. Et Andrew Lau il sait ce que c'est, en engageant Tony Leung, qui avec son charme dévastateur et son sourire désarmant d'un glamour incarné reste impeccable même dans les pitreries de Jeff Lau. Pas facile. Allez faire jouer ça à un acteur français. Pas facile encore de donner la réplique à Andy Lau, qui n'est pas Tony Leung mais parce qu'il a joué dans Running Out of Time de Johnnie To (l'homme aux mille concepts), on n'est pas prêt de l'oublier ce beau gentleman cambrioleur.Avec Infernal Affairs certains penseront au Heat de Mann, d'autres à Un Flic dans la mafia, la série, mais peu importe les bilans, inutile de s'amuser au jeu préféré du néo-cinéphile qui entre analyse crypto universitaire et comptage des points n'a souvent rien de mieux à faire. Oui le cinéma américain est la ligne de mire d'Andrew Lau, et il faudrait vraiment être un imbécile pour aller lui reprocher. On sait que depuis vingt ans le cinéma hong kongais survit en imitant et dépassant le cinéma américain. Que c'est cette dynamique d'intense séduction qui a permis de créer les formes et les esthétiques les plus folles du cinéma contemporain. Jusqu'en 1997. Depuis, l'industrie hong-kongaise attend patiemment de voir comment le continent s'éveille. Justement, Infernal Affairs est un peu comme la cavalerie. Il vient à point pour redonner souffle et vie au cinéma de Hong Kong, Et s'il ne redonne pas de sang neuf, la tentative, rien que le coup d'essai, mérite d'être salué au-delà du résultat pour sa foi, son irascible volonté de faire une copie qui dépasserait l'original.Bilan : Infernal Affairs nous fait gagner du temps et jamais en perdre. Entre méli-mélo chinois un peu pathos, polar très chic high-tech et jeu de miroir où les frontières sont si troubles pour les êtres qu'ils se perdent dans un monde où règnent suspicion et instabilité, Andrew Lau tente plus que de faire du grand spectacle et renaître l'âge d'or du cinéma de HK. Un âge d'or est fait pour mourir et être jugé ainsi après sa mort. Lau veut croire que le cinéma fait à HK aujourd'hui peut vivre, que ses stars sont les plus belles du monde, qu'il peut snober sans honte hollywood. Il croit en son potentiel, dans sa formidable dynamique, avec une insolente confiance en soi et une allure de nouveau riche très nouvelle économie chinoise. Alors à l'américaine Infernal Affairs ? Allons, Scorsese lui-même va en faire un remake avec Di Caprio. Sauf qu'il n'y aura pas Andy Lau et Tony Leung, et pour comprendre combien ils sont précieux, il faudra aller voir le film d'Andrew Lau, et surtout en salle, dans le noir personne ne vous verra rougir.Infernal Affairs
    Andrew Lau Wai-Keung et Alan Mak Siu-Fai, Hong Kong, 2002.
    Durée : 1h39
    Avec Tony Leung Chiu Wai, Andy Lau Tak-Wah, Anthony Wong Chau-Sang, Eric Tsang Chi-Wai, Kelly Chen Wai-Lam…
    Sortie nationale le 01 septembre 2004[Illustration : Tony Leung. Photo courtesy Media Asia]
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